#11 Vignes et NGT : quand la génétique s’en mêle

Les NGT, techniques controversées qui permettent de manipuler le génome d’une plante, intéressent aussi le monde viticole. Aujourd’hui interdites, leur autorisation est en débat à l’UE. Entre solution miracle aux problématiques de durabilité et boîte de Pandore, le débat s’annonce complexe. Décryptage.

Vignes et NGT : quand la génétique s'en mêle

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🇪🇺 En 2018, l’UE avait dédicé de classer les NGT ou Nouvelles techniques génomiquesdans la même catégorie que les OGM, et de les soumettre aux mêmes réglementations. Autrement dit, à les interdire. Mais après de longs débats et enquêtes, le Parlement européen a en effet proposé en juillet 2023 de sortir la catégorie NGT1 de cette réglementation OGM. Les NGT1 sont les techniques qui permettent d’obtenir des mutations du génome auxquelles on aurait pu aboutir ‘naturellement’, via l’hybridation par exemple, entre espèces « franchissables ». (Deux vitis ensemble oui. Une vitis avec un maïs, non merci). Ces NGT1 pourraient être autorisées, tandis que les NGT2 resteraient interdites. Une proposition validée en janvier 2024 par la commission Envi (environnement) du Parlement par 47 voix pour, 31 voix contre et 4 abstentions. Puis adoptée en février 2024 par le Parlement (307 voix pour, 263 contre et 41 abstentions), en vue des négociations avec les États membres. 

Grâce aux NGT, sauver vitis vinifera… ou vendre son âme au diable ?

🍇 Les NGT intéressent d’abord les semenciers, mais la vigne est concernée. Les pépiniéristes intéressés (comme le leader Mercier) espèrent modifier certains traits d’un pinot noir (par exemple) afin de le rendre résistant à la sécheresse, ou au mildiou. Voire les deux. En théorie. Extrait de Vitisphère (janv 24) : « Récemment, des chercheurs chiliens ont obtenu une vigne résistante à l’oïdium par la nouvelle technologie de génie génétique CRISPR/Cas9, permettant de couper l’ADN à un endroit précis du génome des cellules végétales. L’édition génomique a déjà fait l’objet de 900 brevets aux Etats-Unis et en Chine et moins de 200 en Europe (hors UE). Un tiers concerne des applications agricoles, comme des bananes qui ne brunissent pas. »

En théorie toujours, ce nouveau pied de vigne modifié, qui resterait un vitis vinifera, pourrait toujours s’appeler pinot noir… Pas besoin alors de changer le cahier des charges d’une appellation, ou de modifier en profondeur les habitudes techniques et des consommateurs. Si ça marche, car il n’existe à ce jour aucun pied de vigne modifié, cultivé en conditions réelles puis vinifié pour le prouver.

🙋 Les NGT, qui produisent des OGM, sont loin de faire l’unanimité. Au nom du principe de précaution, du risque de dissémination de plantes avec un impact environnemental imprévisible, mais aussi des questions de propriété intellectuelle sur le vivant, des ONG comme GreenPeace s’opposent aux NGT. Députés européens socialistes, insoumis et écologistes ont voté contre. A lire pour avoir une idée des critiques qui s’exercent contre ces techniques, cette enquête de Reporterre : « S’opposer aux NGT, les « nouveaux OGM », est-il anti-scientifique ? » « L’aspect sanitaire est loin d’être le plus préoccupant avec les NGT, par rapport au risque de perte d’autonomie des paysans, par exemple », reconnaît Olivier Leduc, conseiller scientifique d’Inf’OGM, association de veille citoyenne sur les OGM.

Le débat européen a démarré et s’annonce costaud. Et même si la réglementation est adoptée, il faudra 10 à 15 ans aux pépiniéristes pour proposer des plants de vigne modifiés. Et ils resteront interdits en bio, ont déjà annoncé les responsables du réseau bio.

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